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— rien à signaler —
Angela Queen of Hel, ce n’est pas tout à fait que l’aventure d’Angela, assassin d’Asgard qui devient la reine des enfers, mais plutôt l’histoire de Sera, sa compagne et ancien Anchorite – ces anges hommes sans ailes asservis. La narration est endossée par cette dernière qui va nous raconter son périple et comment à travers celui-ci Angela a vaincu Hela, souveraine de Hel.
Sera se positionne dès les premières bulles comme the life of the party (le cœur de la fête). Elle est drôle, belle, magique, peut jouer un solo de luth incroyable et elle le sait. Au-delà de son humour à toute épreuve, elle incarne aussi le combat pour sortir des cases qu’on lui a attribué à sa naissance ; à la fois en tant qu’esclave, mais aussi en tant qu’homme, né dans un corps qui n’est pas le sien. Cette histoire reprend les répercussions de ce premier combat jusqu’à son ascension avec Angela à la tête des enfers.
Tout commence avec Angela, une assassine d’Asgard – la maison des dieux de la mythologie nordique – qui reçoit un message de son amour perdue Sera, prisonnière de Hel – le royaume des morts. Guerrière chevronnée, Angela tracera son chemin à coup d’épée jusqu’à sa bien aimée. Avec les pouvoirs de Sera, elles partiront ensemble à la conquête de Hel. Tout au long de leur expédition, elles se feront des alliées et affronteront des femmes tout aussi puissantes qu’elles jusqu’à arriver à Hela, souveraine d’Hel.
Une auteure engagée pour la représentativité
Avec Angela Queen of Hel, son auteure Marguerite Bennett signe sa première série de comics continus. Elle a, par la suite, écrit la série DC Bombshells avec des personnages féminins qui représentent à la fois des personnes queer, des femmes de couleurs, de religions, de nationalités, d’âges et de chemins de vie différents. Elle décrit cet univers comme multiple, à l’image des femmes qui n’ont pas à endosser qu’une seule facette de leur personnalité. L’auteure souligne aussi l’importance d’écrire des histoires queer : “If you write stories that tell folks that queer people can live without shame, they just might grow up believing it”. (Si vous écrivez des histoires qui expliquent aux gens que les personnes queer peuvent vivre sans honte, il se peut qu’elles et ils grandissent en le croyant.) Ses récits ont été reconnus pour sa représentation des personnages LGBTIQ+ par des nominations pour le GLAAD Media Award en 2016 et 2017.
Marguerite Bennett met en œuvre sa vision pour Angela Queen of Hel grâce aux traits artistiques de l’équipe d’illustration formée par l’artiste française Stéphanie Hans et l’artiste philippin Aaron Kim Jacinto. Leur univers nous emmènent aux confins de l’enfer jusqu’à un restaurant de ramens à New York City, nous plongeant à la fois dans un décor sombre et infernal puis dans un décor réaliste citadin. Finalement, le coup de crayon des personnages nous transporte à travers la myriade d’émotions qu’ils peuvent ressentir.
Un Marvel pas tout à fait comme les autres
Si l’univers Marvel a l’habitude de nous servir des blockbusters cinématographiques avec des protagonistes pour la plupart masculins cis et hétéro, heureusement son univers de comics est beaucoup plus vaste et représentatif. Certes, avec les thématiques féministes qui se démocratisent, Marvel a tenté de nous présenter quelques films racontant l’histoire d’héroïnes, mais avec bien moins de succès (et d’effort ?) que ses franchises masculines. Pour les temps d’écran de personnages féminins, le constat sur l’ensemble de la franchise, avant le premier film de super-héroïne de Captain Marvel en 2019, était navrant. Seul Ant-Man and the Wasp parvient à dépasser les 50% de temps d’écran. En fouinant consciencieusement dans cette sphère énorme qu’est celle des comics, on peut trouver quelques perles comme Angela Queen of Hel avec un casting principal entièrement féminin et queer.
Le géant de la bande dessinée américaine a finalement bien voulu mettre légèrement en avant Angela et Sera en les intégrant dans son jeu sur téléphone Marvel Snap. Cependant, cela reste un ajout timide qui ne donne pas plus d’information sur l’histoire de ces deux héroïnes. En choisissant de ne mettre en lumière que des histoires populaires, la marque contribue malheureusement toujours à une invisibilisation des minorités.
Des héroïnes jusqu’aux antagonistes… que des femmes badass
L’œuvre nous propose une perspective rafraîchissante où les rôles sont inversés. Les figures centrales et secondaires ainsi que les antagonistes sont des femmes avec des comportements attribués normalement aux héros de l’univers où elles évoluent. A l’inverse, on y retrouve très peu de personnages masculins. Une œuvre qui renverse le test de Bechdel avec à peine deux hommes qui s’adressent la parole et principalement avec l’objectif de parler des femmes. Même si, à terme, l’équilibre entre représentation de personnages de tout genre est un but à atteindre en soi, qu’est-ce que ça fait du bien, pour une fois, que la représentation majoritaire soit celles de femmes queer ; un univers sous-représenté dans la littérature popularisée.
Des femmes badass oui… mais des femmes qui restent dans une représentation sexualisée et conforme aux modèles de beauté standard. Les dessins nous montrent des figures fines, à taille de guêpes et poitrine généreuse. Certes, l’univers des superhéros présentent aussi majoritairement des hommes au physique de rêve et aux abdos d’acier, cela n’empêche en rien qu’un vrai manque de représentativité se fait sentir sur ces aspects-là.
En conclusion, Angela Queen of Hel apporte son lot d’héroïnes queer qui manque cruellement dans cet univers très masculinisé. Même si la représentation des personnages reste trop conforme à des standards de beauté rigides et non représentatifs de la réalité de la diversité de nos corps, l’histoire et les relations interpersonnelles entre les personnages est plaisante et rythmée. La série reste un bon comic à dévorer
Données techniques
- Autrice: Marguerite Bennett
- Équipe d’illustration: Stephanie Hans et Aaron Kim Jacinto
- Éditions: Marvel
- Dates de publication: octobre 2015
Les points forts
- Personnages principaux féminins et queer, personnages secondaires et antagonistes féminins
- Un récit où l’on retrouve de la baston et une histoire d’amour badass
- Des relations interpersonnelles touchantes
Les points faibles
- Des personnages qui répondent à des critères de beauté pas représentatifs
- Le comic est difficilement accessible en support physique